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RUE PRINCIPALE

— Mais oui, Bob, mais oui, mon chéri, bien sûr.

— Comme ça, tu consentirais à devenir madame Robert Gendron ?

Elle n’avait pas répondu tout de suite. C’était vrai pourtant que les jeunes filles devaient s’attendre à changer de nom un jour. Elle n’y avait jamais songé.

— Madame Robert Gendron, avait-elle dit. Ça sonne bien.

— Alors, c’est oui ?

Derrière eux, sur la route, une automobile était passée en trombe et, dans le haut-parleur, la plainte du tzigane s’était achevée dans un sanglot.

— Pas tout de suite, Bob. Veux-tu ?

— Pourquoi, Ninette ?

— Parce que… parce que ça ne serait pas juste pour toi que je te dise oui tout de suite.

— Pas juste ?

— Non. À cause de Marcel.

— De Marcel ?

— Oui Bob, de Marcel. Il a vingt ans, il ne travaille pas deux mois par an et je ne voudrais, pour rien au monde, que mon mari soit obligé de le nourrir.

Brusquement, il avait coupé la musique.

— Franchement, je suis assez content que tu aies amené la conversation sur ton frère. Ça fait un petit bout de temps que je voulais te parler de lui.

— Me parler de Marcel ?

— Oui Ninette. Je n’aime pas beaucoup les gens qu’il fréquente depuis quelque temps. Quand il n’est pas chez Tony, à la salle de pool[1], il tourne autour de Suzanne Legault.

  1. Billard américain, à blouses.