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LES LORTIE

— Votre argent à vous autres ?

— Oui, Marcel. C’est une longue histoire, mais pour que vous compreniez bien ce qui m’a poussé à agir comme je l’ai fait, je vais vous la raconter.

Et André Lamarche commença son récit.

— Quand mon grand-père est mort, on n’a pas retrouvé son testament. Pourtant, il en avait fait un. Ce qu’on a retrouvé, ce que mon oncle Léon a retrouvé, c’est un papier par lequel ma mère, il y a vingt ans, reconnaissait avoir reçu sa part d’héritage.

— Ce papier était-il véritable ? demanda monsieur Bernard.

— Jusqu’à un certain point, oui. Vous allez comprendre. Il y a vingt ans, tout de suite après le mariage de mes parents, mon père a eu des difficultés d’argent. Il s’était installé à son compte, ça n’avait pas marché, et un jour, pour éviter la catastrophe, ma mère est allée trouver mon grand-père. Il fallait, pour sauver mon père, un peu moins de trois mille piastres. Mon grand-père n’était pas bien riche, mais il s’est quand même arrangé pour donner à mes parents ce qu’ils lui demandaient et, comme ça représentait à peu de chose près la moitié de ce qu’il possédait, il a fait signer le papier en question par ma mère, pour que, s’il venait à mourir, mon oncle Léon ne soit pas lésé.

— Est-ce qu’il n’y avait pas d’autres enfants ? demanda Marcel. N’as-tu pas dit tout à l’heure que Léon Sénécal était le plus jeune des frères de ta mère ?

— Oui, répondit André, mais l’autre était mort depuis quelques années déjà. Après ça, mon grand-père a été chanceux. Il a fait de l’argent, pas mal d’argent même. Ce qui fait que, quand il est mort, il valait entre vingt-cinq et trente mille piastres.