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LES LORTIE

qu’assez loin de l’agglomération. Les pompiers auraient dû être arrivés !

— Tu sais bien, fit une voix répondant à la première, que ces paresseux-là vont se montrer quand ça sera tout brûlé.

Mais Mathieu et Girard venaient de faire leur apparition. Tout de suite le boucher réunit quelques spectateurs.

— Venez-vous-en, les gars ! cria-t-il au-dessus du crépitement des flammes. Il y a encore moyen d’entrer dans la maison. Sauvons ce que nous pourrons !

Au lieu d’avancer, quelques hommes reculèrent : mais d’autres, et parmi eux Marcel, se précipitèrent dans la maison et en ressortirent bientôt, toussant et crachant, mais porteurs de quelques misérables objets de mobilier.

De minute en minute la foule grossissait, et le cercle qu’elle formait s’élargissait, tant la chaleur augmentait et faisait reculer les curieux mieux que le meilleur des services d’ordre.

Une chaîne avait fini par s’organiser, et une dizaine de seaux circulaient de main en main. Mais que pouvaient quelques misérables seaux d’eau contre ce feu dont le vent activait la rage ?

— Approchez pas trop !

— Laissez passer les chaudières !

— Allez donc jaser plus loin, les femmes !…

— Par ici Ernest !…

— On y va là !…

— Faites bien attention, ça va s’écrouler bien vite !…

Les avertissements, les conseils, les imprécations, les encouragements se croisaient, bondissaient, rebondissaient, tandis que quelques hommes livraient vaillamment un combat perdu d’avance !