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pense ! » Puis il mit le sac sur son dos, et s’en alla sans seulement les regarder.

A quelques mois de là, les deux sœurs allèrent un jour pêcher un plat de poisson. En approchant de la rivière, elles aperçurent une espèce de grosse sauterelle qui sautait au bord de l’eau comme si elle avait voulu s’y jeter. Elles accoururent et reconnurent le nain. « Qu’as-tu donc ? dit Rougerose ; est-ce que tu veux te jeter à l’eau ?

— Pas si bête, s’écria le nain ; ne voyez-vous pas que c’est ce maudit poisson qui veut m’entraîner ? »

Il avait jeté sa ligne ; mais malheureusement le vent avait mêlé sa barbe avec le fil, et, quelques instants après, quand un gros poisson vint mordre à l’appât, les forces de la faible créature ne suffirent pas à le tirer de l’eau ; le poisson avait le dessus et attirait à lui le nain. Il avait beau se retenir aux joncs et aux herbes de la rive, le poisson l’entraînait et il était en danger de tomber à l’eau. Les petites arrivèrent à temps pour le retenir, et elles essayèrent de dégager sa barbe, mais ce fut en vain, tant elle était mêlée avec le fil. Il fallut encore avoir recours aux ciseaux et en couper un tout petit bout. Dès que le nain s’en aperçut, il s’écria avec colère : « Est-ce votre habitude, sottes brutes, de défigurer ainsi les gens ? Ce n’est pas assez de m’avoir écourté la barbe une première fois, il faut aujourd’hui que vous m’en coupiez la moitié ; je