Page:Baudrillart - La Liberté du travail, l’association et la démocratie.djvu/97

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
80
LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

ses formes populaires, fût plus avancé qu’en Angleterre. Il n’en est pas ainsi pourtant. C’est un fait que la population laborieuse en Grande-Bretagne trouve plus de recours que chez nous dans le crédit. Les banques d’Écosse sont d’une véritable utilité populaire. Elles prêtent dans les campagnes comme dans les villes à des hommes sans capitaux, pourvu qu’ils trouvent deux répondants solvables, lesquels ne leur manquent guère, témoin un crédit qui s’évalue à plus de 6 millions de livres sterling accordé à l’activité intelligente dépourvue d’argent.

L’Angleterre n’est pas d’ailleurs le seul pays qui nous devance. L’Allemagne cite avec orgueil les banques d’avances populaires, fondées sur l’idée du crédit mutuel et qui fonctionnent avec un succès croissant depuis 1850. Des centaines de banques de ce genre couvrent aujourd’hui l’Allemagne, réparties entre la Prusse qui en a le plus grand nombre, la Saxe royale, les États thuringiens, le Hanovre, les provinces allemandes de l’Autriche, le Mecklenbourg et les autres États allemands. Nous sommes loin d’en être là. Les banques dites de prêt d’honneur pour les ouvriers, idée grande et juste, mais malheureusement prématurée pour la trop grande masse, ont réussi chez nous sur un petit nombre de points. La caisse d’épargne est une institution admirable, mais suffit-elle ? mais se meut-elle assez librement, et n’est-elle pas beaucoup trop dans la dépendance de l’État ? Nos monts-de-piété, prêtant à un taux qualifié d’usuraire par la loi, prêtant sur les instruments les plus nécessaires du travail ou sur les objets dont il est le plus difficile de se passer, sont, malgré les secours qu’en tire la misère, l’enfance de l’art et à peu près l’état barbare du crédit. Je ne les incrimine ni les calomnie. Leur suppression serait un malheur. Mais quant à trouver que c’est suffisant et satisfaisant, il faut être doué pour cela d’une dose d’optimisme excessive.

Que l’agriculture ait besoin du crédit comme l’indus-