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RÉFORMES ÉCONOMIQUES.

nombre des élèves dont elle a doté l’industrie du pays est de 91,836. C’est ainsi que nos voisins, avec la grande école de South-Kensington, se sont entendus à faire de la centralisation. Ils ont appelé sur ce point spécial l’intervention directe de l’Etat, ils ont créé des professeurs fonctionnaires, dès qu’il s’est agi d’inoculer à leurs ouvriers le goût et l’habileté des arts du dessin. South-Kensington met un professeur à la disposition de toute école d’art, à la condition qu’elle fera enseigner le dessin dans cinq écoles publiques de pauvres ou cinq cents pauvres au moins ; qu’elle instruira à prix réduits des moniteurs pour les écoles des pauvres, et qu’une classe du soir sera tenue trois fois par semaine au prix minimum de 60 c. pour la semaine. Combien d’heureux fruits avait déjà portés cette institution à l’Exposition de 1862 ! Mais combien nos rivaux paraissent loin d’être encore au terme de leur progrès ! Un juge éminent, M. Mérimée, dans son rapport, juge la situation grave, même menaçante, et il invoque un remède que nous indiquerons. Il pose en principe « qu’il ne peut être douteux, pour quiconque a étudié l’histoire des beaux-arts, qu’à toutes les époques où de grands maîtres ont fleuri et fondé des écoles illustres, l’industrie n’ait pris en même temps un essor nouveau et très-considérable. L’influence la plus heureuse s’est étendue à tous les produits manufacturés susceptibles de recevoir une ornementation. » Quels exemples que ceux de la Grèce, du moyen âge, de la Renaissance ! Benvenuto Cellini procède de Raphaël et de Michel-Ange. Est-ce là un fait isolé ? Non. Mille autres preuves l’attestent il existe une relation intime entre toutes les parties de l’art ; partout où surgit un grand artiste se forment des ouvriers habiles et intelligents, tandis que si, au contraire, la tête souffre, les membres doivent souffrir aussi. La conclusion, c’est qu’il faut réformer l’art par le sommet, en tant du moins que cela dépend de l’État, c’est-à-dire par l’enseignement. L’enseignement des beaux-arts n’est point