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INTRODUCTION.

toutes ces conquêtes du bien sur le mal sont peu contestables, quoique nous en jouissions souvent en ingrats, comme il arrive toujours pour les biens acquis, dont le sentiment s’émousse, ce n’est pas une raison pour l’économie politique de ne pas appeler des perfectionnements nouveaux dans le sens de l’égalité, de la justice et du bien-être. L’instruction est, malgré tout ce qui a été réalisé pour sa propagation, distribuée encore de telle sorte que la France est un des pays où le peuple sait le moins. La seule banque presque pour les économies des classes ouvrières est la caisse d’épargne. La seule banque de prêt est le mont-de-piété, prêtant sur les objets les plus nécessaires à la vie et sur les instruments mêmes du travail, à un taux que la loi qualifie d’usuraire. La place faite aux femmes dans la société laborieuse est sacrifiée souvent, sans pudeur et sans justice, aux droits de la masculinité invoqués par de singuliers démocrates qui ne reculent pas devant l’idée de soumettre l’industrie au régime de la loi salique. Voilà ce que notre société ne pourrait accepter plus longtemps, voilà des maux dont l’économie politique appelle hautement la réforme !

N’est-ce donc point là de la fraternité ? Ne reculons pas devant ce terme. Je sais bien qu’il a joué de malheur, car c’est au nom de ce mot si doux que les plus emportées disputes se sont élevées et que le sang a coulé dans les places publiques et sur les échafauds. L’économie politique méconnait, a-t-on dit pourtant, le dogme sacré de la fraternité. Un seul mot à ce sujet. Il y a une fraternité touchante et sublime qui s’appelle le sacrifice. Cette