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DU PROGRÈS.

la difficulté de vivre. Je répondrai à ce reproche, tout en avouant qu’il s’en faut que la France produise en fait de bétail, je ne dis pas ce qu’elle pourrait produire aujourd’hui, mais ce qu’elle pourra produire, son capital agricole étant augmenté, et tout prouve qu’il augmente. La vérité est que l’augmentation des prix tient en partie à une demande plus vive, à une consommation plus grande, très-dûment attestée. Or, si la formule du progrès économique est le bon marché, elle est avant tout, même les prix restant les mêmes ou s’élevant un peu, l’admission d’un plus grand nombre de participants à des biens dont, pendant des siècles, ils n’avaient presque pas eu la jouissance. C’est ce qui arrive pour la viande, dont la production n’a pas augmenté proportionnellement à la population depuis 1789, mais n’a pas diminué non plus, d’après les calculs les plus récents et les plus avérés. La viande de boucherie n’est d’ailleurs, si important que cet article soit, qu’un des objets d’alimentation (celle de charcuterie a beaucoup augmenté). Le prix moyen du blé ne paraît pas avoir changé. Arthur Young dit que le pain de froment se payait 3 sols la livre, et le pain de seigle que mangeait communément le peuple, 2 sols ; on l’a remarqué, s’il y a une différence, elle est plutôt en moins. La consommation des légumes secs et des pommes de terre a pris notamment de grandes proportions. En dernière analyse, la part proportionnelle de chacun, et c’est ce qui importe, a sensiblement augmenté pour les produits alimentaires. Enfin, que sont aujourd’hui nos disettes ? Beaucoup moins fréquentes que dans le passé, elles ne dégénèrent plus en famines. La libre circulation des grains à l’intérieur, qui établit la solidarité de province à province, et produit le nivellement des subsistances comme des prix, y a mis bon ordre. Jadis, le défaut de commerce international, la pénurie des capitaux, l’insuffisance des voies de communication et des moyens de transport, et d’autres causes