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DU PROGRÈS.

précédé les autres dans la carrière de la liberté, de la publicité, dans les garanties de l’ordre légal. Voilà pourquoi, lorsque notre révolution de 1789 s’est opérée, nos pères ne séparaient pas ces deux choses dans leurs vœux ardents et dans leur confiance illimitée, le triomphe de la raison humaine, le triomphe prochain et complet des principes par elle reconnus et démontrés vrais, le triomphe d’une liberté religieuse, philosophique, politique, économique sans comparaison plus grande que celle qui avait été le partage du passé, et le perfectionnement de la condition de l’humanité à tous les degrés, sans acception de classes, sans acception même de peuples. Voilà pourquoi, toutes les fois qu’on voit une sorte de scission, momentanée même, accidentelle, avoir lieu entre ces éléments, l’esprit humain, arrivât-il à trouver l’explication de ce phénomène, s’en étonne, s’en afflige comme d’une anomalie, d’une contradiction ; il lui semble qu’en vertu d’une solidarité qui peut être suspendue, mais non abrogée, toutes les parties de la civilisation, formant un ensemble complet, un vivant organisme, sont appelées à s’abaisser ou à se relever ensemble.

Essayons maintenant de marquer, telles que les conçoit la science économique, en s’éclairant des données des sciences collatérales, les conditions qui paraissent les plus indispensables à l’accomplissement du progrès économique sous le régime d’une démocratie libérale.

II

Les conditions du progrès économique, et ceci justifie ce qui précède et nous y ramène, sont d’abord de l’ordre intellectuel et moral. C’est ce que la démocratie doit s’attacher à bien comprendre. Sans cela, nulle liberté du travail qui soit véritable et qui soit féconde, nulle forme de l’association qui soit possible ou durable.