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L’ÉCONOMIE POLITIQUE ET LA DÉMOCRATIE.

forme aujourd’hui si en relief, de machines et de moyens perfectionnés de fabrication et de transport. Non, les économistes n’ont rien exagéré, ils ne se sont pas laissé aller à une orgueilleuse présomption en avançant que par ces énergiques moyens de production le capital partage avec les plus nobles puissances, avec la religion, avec la philosophie, l’honneur d’avoir été le véritable émancipateur des masses. Il ne suffit pas que la religion, animée d’un divin esprit de charité, que la philosophie, pénétrée des idées de droit et d’égalité humaine recommandent de traiter le travailleur avec douceur, si la nature même de son travail est affreusement pénible. Il ne dépend pas de ces hautes puissances de faire que broyer le grain à la façon des esclaves de Pénélope, dont il est question dans Homère, que porter des fardeaux comme le faisaient les peuples primitifs, et comme cela se passe encore, hélas ! dans des pays civilisés, où l’on voit, au sein des campagnes, des femmes mêmes le dos courbé sous des poids énormes, ou que conduire un navire à sa destination, ne soient des travaux extrêmement durs tant que l’homme est réduit à l’action de ses mains, aidées à peine de quelques outils. Ces travaux ne s’adoucissent, ne laissent un peu de répit et de loisir à ceux qui en sont chargés que lorsque les moulins à eau ou à vent, les animaux disciplinés au joug, la voile et la vapeur viennent prendre à leur charge la partie la plus grossière et la plus pénible de la tâche. L’histoire de l’industrie, – qui persisterait aujourd’hui encore à le nier en présence de tant de merveilles – est celle de l’affranchissement successif du travail humain. Il faut que l’homme reste esclave ou que