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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

assemblées provinciales ou régionales ne sont-elles désormais qu’une utopie ? Je ne sais, mais j’aimerais à voir l’utopie, si c’en est une, se diriger dans ce sens historique et sensé, tout conforme aux véritables intérêts du pays ; je voudrais du moins qu’on pût lui appliquer ce que Beaumarchais dit de la calomnie : Il en reste toujours quelque chose ! Lorsque l’on réduit le préfet, représentant de la centralisation, à un rôle purement politique, lorsque l’on conteste à la commune les éléments d’une vie suffisante pour former un tout complet, et qu’on lui laisse seulement la direction de son état civil et de sa police rurale, en changeant ainsi le problème des libertés communales en celui des libertés cantonales, et en investissant le canton d’attributions nouvelles, on peut être contredit, nous croyons qu’on se rapproche beaucoup du vrai. Certes, la commune n’a pas aujourd’hui la somme de franchises qu’elle devrait avoir. Mais l’usage qu’elle a fait de celles qui lui restent n’a pas toujours été tellement heureux que plusieurs des empiétements du pouvoir central n’aient paru justifiés à des esprits fort libéraux : cela a été sensible surtout pour l’instruction primaire, dont un si grand nombre de conseils municipaux paraissaient naguère médiocrement apprécier les bienfaits. Combiner l’extension des libertés communales


    vient de retracer, dans un livre consacré à ces assemblées, le remarquable et saisissant tableau. Elles n’eurent qu’une existence éphémère ; elles trouvèrent une opposition violente dans la noblesse si peu intelligente, hélas ! de ses intérêts et de ceux du pays, et dans les Parlements hostiles à la constitution d’un pouvoir rival. Tous les cahiers des États généraux en 1789 se prononcent pour ces assemblées provinciales et attestent combien l’idée en était populaire. Ils contiennent des vœux en faveur des franchises locales qui donnent au mouvement de 1789 un caractère décentralisateur auquel la Révolution ne s’est pas montrée fidèle.