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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

quelques autres de ses maîtres, a fait l’apothéose de l’État. Les théories de la Révolution, complétées par les idées disciplinaires de l’Empire, ont créé en grande partie ce que nous voyons.

Mais que la faute se partage plus ou moins entre la vieille monarchie, la République et l’Empire, c’est à l’avenir qu’il faut songer. Il y va du triple intérêt de la province, de la France, du gouvernement. La province ne peut plus décliner désormais sans rencontrer le néant même. Il faut qu’elle se relève ou qu’elle périsse. D’autres foyers que Paris doivent se ranimer. Cela peut se faire sans que la province cesse de considérer Paris comme le grand et universel foyer, sans qu’elle se mette à lui porter stérilement envie. Demander la résurrection de tout ce qu’il est possible de ranimer dans la vie provinciale, cela ne veut pas dire qu’il faille partager en vingt ou trente parties égales le musée du Louvre et les expédier au dehors, à la destination de Lyon, de Bordeaux, de Rouen, de Caen, de Dijon, de Strasbourg, cela ne veut pas dire que les Académies de province doivent supprimer l’Institut de France. Mais entre ces deux extrémités, être moins que Paris et n’être rien ou à peu près rien, qui pourrait dire qu’il n’y a pas une marge assez large ? Pourquoi nos départements ne feraient-ils pas sur certains points concurrence à Paris ? Y a-t-il plus de raisons qu’autrefois pour que le droit, la théologie, la médecine, l’érudition habitent spécialement la capitale ? On trouve commode d’expédier de Paris des ordres sans réplique et des révolutions toutes faites. Avantage trompeur que trop de dangers compensent. La province, qui ne résiste jamais au gouvernement, ne résiste pas davantage à ceux qui le renversent. Dans les révolutions, la province n’a jamais joué que le rôle du chœur dans les tragédies antiques, rôle résigné et qui se borne à faire entendre d’inefficaces gémissements sur les événements accomplis. Mais comment