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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

même dans un système qui pêche par l’excès, il y a d’utiles vérités à recueillir pour les classes populaires.

Disons d’abord un mot du monstre lui-même, de ce terrible Malthus dont le nom a si souvent retenti, au plus fort de nos discordes sociales, aux oreilles des classes ouvrières.

Voici comment un publiciste éminent, M. Charles Comte, s’exprime, dans sa Notice consacrée à Malthus, sur l’auteur du livre de la Population « Il était d’un caractère doux, il avait sur ses passions un si grand empire, il était si indulgent pour les autres, que les personnes qui ont vécu près de lui pendant près de cinquante années assurent qu’elles l’ont à peine vu troublé, jamais en colère, jamais exalté, jamais abattu. Aucun mot dur, aucune expression peu charitable ne s’échappait jamais de ses lèvres contre personne ; et, quoiqu’il fût plus en butte aux injustices et aux calomnies qu’aucun écrivain de son temps, et peut-être d’aucun autre, on l’entendit rarement se plaindre de ce genre d’attaques, et jamais il n’usa de représailles. Il était très-sensible à l’approbation des hommes éclairés et sages ; il mettait un grand prix à la considération publique. Mais les outrages non mérités le touchaient peu, tant il était convaincu de la vérité de ses principes et de la pureté de ses vues ; tant il était préparé aux contradictions et même à la répugnance que ses doctrines devaient inspirer dans un certain monde. Sa conversation se portait naturellement sur les sujets qui touchent au bien-être de la société, et dont il avait fait l’objet d’une étude particulière : il était alors attentif, sérieux, facile à émouvoir. Il énonçait son opinion d’une manière si claire, si intelligible, qu’on voyait aisément qu’elle était le résultat d’une réflexion profonde. Du reste, il était naturellement gai et enjoué, et aussi prêt à prendre part aux plaisirs innocents de la jeunesse qu’à l’encourager ou à la diriger dans ses études. »