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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

pent, la passion et la finesse sont leur lot et leur privilége. C’est par la finesse, la sagacité que se recommandent leurs livres d’éducation. Sera-t-il permis d’indiquer ce modeste genre des livres d’enseignement élémentaire à des femmes qui, après expérience, ne se trouvent point avoir ce qui fait le grand poëte et le grand romancier  ? C’est pour plusieurs déjà une ressource utile. Sans doute toutes n’ont point le don difficile de composer de bons livres pour l’enfance. Mais c’est chez elles un des moins rares. Lumières du cœur, amour de l’enfance, esprit pratique, don de direction, précision, netteté, que faut-il de plus pour trouver le chemin de l’intelligence et du cœur de l’enfant ?

L’enseignement est aujourd’hui et tend à devenir de plus en plus une carrière pour les femmes. Là aussi elles rencontrent au sein des pensionnats la concurrence des hommes. Un jury masculin les examine et les juge. Est-ce juste aussi ? J’aurais trop à dire sur l’instruction qu’on leur distribue en général. Science sèche, programmes indigestes, des dates sans lumière et non pas l’histoire rendue intéressante par les détails et par la grandeur émouvante des événements et des personnages, presque partout la lettre morte au lieu de l’esprit qui vivifie, en un mot de quoi les dégoûter à jamais des livres sérieux, voilà, sauf exception, l’éducation que reçoivent aujourd’hui les femmes ! L’âme et l’utilité vraie y manquent également. L’instruction publique présente à la femme pauvre un débouché, mais quel débouché le plus souvent ! Sur le nombre des institutrices existant en France, on a calculé, il n’y a pas longtemps, que plus de quatre mille ne jouissent que d’un revenu inférieur à 400 fr., et que près de 2,000 ont entre 100 fr. et 200 fr. La rétribution des élèves payants étant presque partout insignifiante, c’est encore l’aiguille qui complète les émoluments. Les institutrices employées dans les maisons particulières vivent du moins !