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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

mède complétement efficace, c’est de ne pas l’exagérer et de prendre garde de l’envenimer par la déclamation. Les sociétés ne sont obligées après tout qu’à la bonne volonté. Entre la conscience du mal et la découverte des moyens de guérison, comment empêcher qu’il ne s’écoule toujours plus ou moins de temps ?

L’inefficacité des remèdes radicaux est un des tristes résultats de l’examen de la situation des femmes pauvres. Il n’y a guère que la loi qui ait le privilége de trancher certaines difficultés. Mais trancher n’est pas résoudre. Nous approuvons vivement, quant à nous, la législation sur le travail des enfants et des hommes dans les manufactures. Mais combien de telles mesures ne sont-elles pas limitées dans leur portée, outre qu’il s’en faut qu’elles soient suffisamment appliquées ! Comment ne pas avouer d’ailleurs qu’une grande réserve est exigée en ce qui touche la législation préventive relativement aux femmes ? La femme n’est pas dans la même situation que l’enfant. Elle dispose d’elle-même. Elle a le même droit que l’homme de travailler et de stipuler en ce qui la concerne. Un législateur qui organiserait le travail féminin ne tarderait pas, pour d’autres motifs plus ou moins analogues, à organiser le travail masculin, et, pour commencer, il désorganiserait celui-ci ; car quel observateur un peu attentif ne reconnaîtra que la répartition des femmes dans certains travaux qui leur seraient exclusivement réservés jetterait une complète perturbation dans l’industrie ? Je repousse donc, pour les hommes comme pour les femmes, les incapacités légales. La condition commune pour tous est la liberté du travail. Au fond, est-il permis de tirer des abus dont on se plaint quelque conclusion fondée en faveur de la réglementation  ? Pourquoi le public, pourquoi les commerçants s’adressent-ils de préférence aux hommes pour en tirer des services auxquels les femmes semblaient naturellement plus propres ? Tout simplement parce que, pour une raison ou