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DE L’ASSOCIATION. — CRÉDIT POPULAIRE.

qu’elles atteignaient mal leur but de venir en aide aux classes ouvrières. Ce sont, sans aucun doute, les ouvriers qui y figurent pour la plus large part, soit quant au nombre des déposants, soit quant à la somme des versements. Je suis d’avis qu’un livret pour 32 habitants, que 444 caisses d’épargne avec plus de 200 succursales, qu’une moyenne, enfin, de dépôts égale à 300 fr. pour chaque déposant, chiffres des derniers relevés, constituent d’assez beaux résultats, moindres pourtant que ceux qu’obtient la Grande-Bretagne, où l’épargne atteint presque au double ; comparaison qui m’humilierait un peu pour nos ouvriers, je l’avoue, si, par un triste revers de médaille, cette industrieuse et riche population anglaise, adonnée au travail des champs et des manufactures, n’accordait à l’intempérance un budget plus grand encore qu’à l’épargne, si tandis qu’en 1843 l’épargne ne recueillait encore pour toute la Grande-Bretagne que 612 millions, la seule Angleterre n’avait consommé la même année plus de 685 millions en liqueurs fortes ! Mais la grandeur des résultats ne doit pas nous faire illusion. Y a-t-il assez de caisses d’épargne dans notre pays ? Que sont les quelques succursales de Paris en comparaison des cent bureaux que la loterie tenait ouverts ! Combien l’éloignement ne met-il pas obstacle aux bonnes résolutions ? Combien de déplacements devant lesquels on recule, et qui, dans les campagnes, paraissent entraîner trop de temps perdu ?

À dire toute la vérité, les caisses d’épargne créent pour le gouvernement un embarras et une charge. De là résultent, dans l’organisation et dans les statuts de ces établissements, des mesures préjudiciables à leur utile développement. Par une conséquence nécessaire de cette immixtion, tous les essais faits pour tirer un bon parti de l’idée fausse qui unit financièrement les caisses d’épargne à l’État n’ont abouti à rien de satisfaisant. Depuis 1818, date de leur fondation en France, jusqu’en 1829, les dé-