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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

tends parler ici ni des sociétés de secours mutuel, dans lesquelles je crains de voir l’État exagérer de plus en plus son intervention, après les heureux débuts qu’elles ont eus en votant de leur propres ailes, ni des caisses de retraite pour la vieillesse, qui ne sont pas non plus des institutions de crédit proprement dites.

L’institution d’essai dont je veux parler n’est évidemment appelée à se développer que par l’association d’un double sentiment qui n’a rien à démêler avec la tutelle de l’État, le sentiment de la responsabilité chez les travailleurs, le sentiment de la charité, mais d’une charité qui dirige et organise encore plus qu’elle ne donne, chez les classes arrivées à la richesse et à l’aisance. Les banques dites de prêt d’honneur ne sont pas autre chose que l’application de l’idée que nous venons de voir réalisée en Écosse. Faut-il accuser de leur peu de succès une solidité morale insuffisante de la part de nos travailleurs, ou un zèle trop froid chez ceux qui pourraient leur venir en aide[1] ? Ce

  1. M. Laurent, dans son ouvrage sur le paupérisme et les sociétés de secours mutuel, cite quelques fondations survivantes : celle de M. le baron de Damas à Hautefort : celle de M. Paul Dupont à Saint-Astier ; celle de Chervais et de Tourtoirac : de Saint-Mexaint, et de Beaumont (Nièvre). Quelques sociétés de secours mutuel cherchent aujourd’hui à mettre en pratique le prêt d’honneur. Les sociétés de Figeac, de Pézenas, de Raismes, sont entrées dans cette voie. On est forcé d’avouer que ces tentatives se présentent avec un caractère de timidité et de réserve qui fait contraste avec ce que nous voyons pour les prêts effectués en Écosse au profit des classes ouvrières et rurales. Le maximum des prêts, pour les banques de prêts d’honneur, était fixé par le projet officiel de 1880 à 200 fr. ; la société de Figeac a fixé le maximum de ses prêts à 30 fr., remboursables par dixièmes. Les sociétés de secours mutuel peuvent-elles faire beaucoup mieux sans altérer leur nature et sans compromettre leur existence ? Peut-être non. Mais des avances ne dépassant pas 80 fr. et même 200, n’assimilent--