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L‘ASSOCIATION. — ASSOCIATIONS OUVRIÈRES.

se demande pourquoi une association ne ferait pas pour ses membres ce qu’une grande compagnie fait pour ses employés, sauf, comme à Rochdale, à répartir ses bénéfices, au lieu de les employer à un trop grand abaissement de prix. C’est encore à la puissance salutaire de l’association qu’il faut rapporter, à Mulhouse même, la création, au centre du quartier des cités ouvrières, d’établissements communs d’une grande utilité. Une boulangerie vend le pain de 5 à 7 c. ½ au-dessous de la taxe municipale. Un restaurant très-vaste et très-proprement tenu reçoit les ouvriers célibataires et procure, pour des prix très-réduits, des portions de soupe et de viande à ceux qui les font prendre sur place. L’ouvrier dépense pour dîner de 35 à 45 centimes. Un établissement de bains très-suivi donne des bains avec linge au prix modique de 20 centimes ; un lavoir, avec séchoir, est ouvert pour deux heures à quiconque paye 5 centimes. Ici, comme pour la construction des maisons, se retrouve encore la trace bienfaisante de M. Jean Dollfus, si bien secondé, pour ce qui regarde les cités ouvrières, entre autres collaborateurs, par MM. Louis Huguenin et Zuber, et par le gérant, M. Bernard.

Les sociétés alimentaires destinées à réaliser le bon marché de la vie pour la nourriture des classes ouvrières ne sont pas soustraites à ces conditions morales que nous assignions tout à l’heure à toutes les associations, quelles qu’elles soient. Elles ne doivent pas agir comme un dissolvant, mais comme un auxiliaire de la famille. C’est avilir l’économie politique, même sous la plus humble de ses formes, à savoir : l’économie domestique, que de la réduire en quelque sorte à un problème de cuisine. Bien manger n’est pas tout, même pour l’ouvrier qui a tant besoin de réparer ses forces, et dont l’alimentation intéresse à un haut degré la puissance productive du pays. Le repas en commun au sein de la famille est pour ainsi dire sacré. C’est là que les corps fatigués se reposent et que les cœurs