Page:Baudrillart - La Liberté du travail, l’association et la démocratie.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
241
L’ASSOCIATION. — ASSOCIATIONS OUVRIÈRES.

industrielle, et des ouvriers leurs auxiliaires dans l’industrie, qu’elles sont nées et se sont multipliées. Le procédé auquel on n’est arrivé qu’après bien des tâtonnements et des essais semble aujourd’hui si simple, qu’on s’étonne qu’on ne l’ait pas trouvé depuis longtemps. C’est l’éternelle histoire de l’œuf de Christophe Colomb ! Rappelons seulement en quelques mots cette organisation aujourd’hui connue. La société civile des cités ouvrières de Mulhouse, qui s’est constituée en 1853 au capital de 300,000 fr., divisé en soixante actions de 500 fr. appartenant à douze actionnaires (il y en, a aujourd’hui dix-neuf), vend à un ouvrier une maison et un petit jardin. Elle fait le compte total de ses déboursés avec l’intérêt. Par une clause expresse de ses statuts, elle s’interdit tout bénéfice au delà de l’intérêt fixe de 4 0/0 que reçoivent les porteurs d’actions. L’ouvrier acquéreur devient le même jour propriétaire et débiteur. Il paye un à-compte de 400 fr., et doit non-seulement le capital, mais encore les intérêts arriérés et l’intérêt courant. La somme qu’il paye chaque mois, qui est de 18 à 25 fr., se compose du loyer calculé sur le taux des loyers ordinaires, et d’une très-légère augmentation représentant l’épargne, et plus spécialement destinée à l’amortissement. La société qui encaisse ces sommes les regarde comme la perception d’un à-compte sur sa créance, et en bonifie l’intérêt au débiteur, qui touche 5 0/0 sur tous les versements, de telle sorte que sa dette est diminuée d’autant, pour le principal et pour les intérêts. En dix, douze ou quatorze ans, suivant les conventions faites, la société a recouvré son capital avec les intérêts, et voilà l’ouvrier, sans que cela lui ait rien coûté qu’un peu d’épargne régulière, propriétaire à jamais, lui et les siens, d’une maison propre, commode et riante. Tout ce qu’il aime y tient, y vit à l’aise. Comment surtout oublier le petit jardin où jouent les enfants, où lui-même respire