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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

presque absolu, qui a même donné son nom à cette société, qu’on appelle l’association Antoine. Elle possède un excellent personnel. Elle présente enfin l’observation scrupuleuse des règles qui, dans la grande société laborieuse, établissent des rémunérations inégales pour des services inégaux. L’attention s’arrête à bon droit sur cette association qui débuta avec un capital social de 804 fr. 20 c., dont 369 fr. en outils et 153 fr. 20 c, en argent, et qui possédait en 1857 un établissement d’une valeur de 400,000 fr. ; elle avait même perçu un bénéfice de 110,000 fr. pour les dix premières années. À la même date, l’association des menuisiers en fauteuils comptait 68 associés, dont 8 en nom collectif, 60 en participation et plus de 100 auxiliaires. On doit accorder les mêmes éloges à l’Association des ouvriers en limes, qui a commencé avec 14 ouvriers et un capital de 2,280 fr. en matériel, et à peu près 500 en argent. Au bout de peu d’années, elle comptait 34 ouvriers, dont la moitié en nom collectif, l’autre moitié en auxiliaires, et faisant 80,000 fr. d’affaires par an. Je signalerai de même l’association des ouvriers imprimeurs qui, au nombre de quinze, acquirent le fonds de la maison Renouard où ils travaillaient depuis des années, et prirent le brevet de leur ancien patron. Une subvention de 80,000 fr. les aida à en payer le prix, qui était de 90,000 fr. Cette florissante entreprise est une preuve que l’association ouvrière peut vivre et prospérer. Au reste, ces ouvriers typographes se montrèrent fort peu enclins tout d’abord aux idées utopistes ; ils déclarèrent dans un langage très-propriétaire, comme on eût dit en 1848, que leur but était de travailler pour produire et d’épargner pour avoir. Leur projet de statuts portait que le gérant possède tous les pouvoirs du patron. Cela est clair et explicite[1].

  1. M. Cochut a présenta, dans un travail fort sympathique à l’association ouvrière, un tableau excellent de ces associa-