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L’ASSOCIATION. — ASSOCIATIONS OUVRIÈRES.

liquider cette entreprise, en attribue l’insuccès à la direction insuffisante du gérant, à l’inexpérience des membres du conseil de surveillance, « à leur ignorance des données les plus communes du commerce, » à l’insolvabilité des commanditaires. À ces causes officiellement signalées par le liquidateur, l’auteur d’un ouvrage tout récent sur les associations ouvrières[1], qui a pu étudier celle-ci de très-près, ajoute le mauvais vouloir et l’inintelligence des ouvriers commanditaires, aussi disposés à réclamer leur part dans les bénéfices que rebelles à contribuer aux pertes. C’est ainsi que, sur la demande en payement que le liquidateur dut former contre eux du montant intégral de leur commandite, la plupart répondirent en excipant soit de la ruine de la société qui, à leurs yeux, devait les exonérer de toute obligation, soit de la clause qui leur permettait de réaliser leur mise de fonds, partie en espèces, partie en salaires d’industrie. Ils ne pouvaient comprendre que l’obligation d’un commanditaire consiste essentiellement à contribuer aux pertes sociales à concurrence du capital qu’il a promis, et que les stipulations particulières ayant pour objet de lui en faciliter le versement par la prestation de son industrie, à défaut d’espèces, ne sauraient être opposables aux tiers. En résumé, la Société des veloutiers a été dissoute avec un passif de 361,715 fr. (sur lesquels elle doit près de 200,000 fr. à l’État), et avec un actif de 166,428 fr. 89 c, seulement.

Nous reconnaîtrons pourtant avec une vraie satisfaction qu’il existe encore plusieurs associations qui remontent à cette époque et qui n’ont pas cessé de se développer. Telle est, par exemple, celle des menuisiers en fauteuils. Elle est gouvernée par un gérant unique revêtu d’un pouvoir

  1. Les Associations ouvrières, par M. Paul Rougier, docteur en droit, avocat a la Cour impériale de Lyon. 1 vol· in-8, chez Guillaumin et Ce. Cet ouvrage a été couronné par l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Lyon.