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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

sistance. Il faut reconnaître que jusqu’ici nulle société aristocratique ou démocratique, s’inspirant, comme le moyen âge, de l’idée de la charité ou, comme les temps modernes, de la pensée du travail, n’est parvenue à le résoudre d’une manière satisfaisante.

C’est le cas de dire un mot des ateliers nationaux ; on entend par là les ateliers publics organisés en vue de venir en aide aux ouvriers sans ouvrage. Si cette désignation est récente, et ne remonte pas au delà de la révolution de 1848, le genre d’établissements qu’elle indique n’est pas nouveau. Avant le règne de la démocratie, on les désignait sous le nom d’ateliers de charité, expression qui en faisait bien comprendre la nature et le but. Ils furent employés plus d’une fois en vue d’éteindre la mendicité et particulièrement dans les temps de crise et de disette. Leur première origine remonte au moins au seizième siècle, et l’on trouve des édits et des ordonnances qui en règlent la police au dix-septième et au dix-huitième. Le roi Louis XVI étendit le mode d’assistance en faisant ouvrir des travaux publics dans chaque province pendant la morte-saison. Turgot, dans son intendance de Limoges, en fit l’usage le plus sage et le mieux entendu qu’on en eût fait encore et qu’on en ait fait depuis lors. À l’époque de la disette qui sévit dans le Limousin, il organisa des ateliers de charité pour ceux qui pouvaient travailler et n’avaient pas d’ouvrage. Les précautions qu’il prit sont extrêmement remarquables et dignes d’être encore aujourd’hui méditées. Il adopta des mesures pour empêcher les ateliers de charité de faire concurrence aux travaux des particuliers et aux industries qui avaient pu se soutenir pendant la disette. Ainsi, le prix payé dans les différents ateliers de charité fut toujours au-dessous du prix courant de tous les autres travaux. De plus, le travail se faisait à la tâche et non à la journée. Enfin, les ouvriers n’étaient payés