Page:Baudrillart - La Liberté du travail, l’association et la démocratie.djvu/204

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET L’ASSISTANCE.

la situation des pauvres eux-mêmes. La dureté de quelques formules qui ont rendu l’économie politique peu populaire ne saurait voiler ni affaiblir dans l’esprit des masses éclairées la profonde justesse et la virilité de ses leçons. Au fond, il ne saurait être question de supprimer l’assistance publique, et il y a lieu de tenir compte de ce que cette assistance dit elle-même dans ses rapports officiels des améliorations qu’elle a reçues en France depuis plusieurs années. L’Assistance publique a voulu sur quelques points se mettre elle-même en garde contre ses défauts les plus naturels. C’est ainsi qu’elle a substitué en partie les secours en aliments, en vêtements, en chauffage, aux secours en argent dans lesquels se glisse plus facilement l’abus. Elle cherche aussi à faire prévaloir le principe des secours à domicile, qui a moins d’inconvénients pour la famille et pour la dignité individuelle. Ce sont là de bonnes inspirations. Quant à l’augmentation dans le chiffre des personnes secourues et dans le nombre des bureaux de bienfaisance, elle tient surtout à cette cause que des individus ayant réellement besoin de secours n’on recevaient pas il y a plusieurs années : ils en reçoivent aujourd’hui. Ainsi, lorsqu’il est constaté que, de 1833 à 1853, le nombre des assistés s’est élevé de près de 31 0/0, tandis que la population générale ne s’est accrue que d’un peu plus de 8 0/0, il ne faudrait pas conclure de ces chiffres que le paupérisme s’est étendu en France, ni que l’assistance soit placée sur la pente d’un laisser-aller abusif.

Est-ce à dire pourtant que tout soit au mieux en ce qui regarde l’assistance publique, même corrigée et perfectionnée ? Dans cette augmentation du nombre des assistés, il y aurait à signaler sans doute une certaine quantité d’individus qui, autrefois à la charge de la charité privée, ont passé pour ainsi dire dans les cadres de l’assistance communale, ce que l’on ne saurait toujours prendre pour