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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

raissent si touchantes, de la charité publique, sont passées tour à tour au crible d’une critique sévère. Les ateliers de travail ! Ils ne font que déplacer et aggraver la misère. Les hôpitaux et hospices ! Ils tuent la prévoyance individuelle, ils brisent les liens de famille. Les établissements d’enfants trouvés ! Ils sont une prime au libertinage. Les crèches et les salles d’asiles ! Elles dispensent les mères des devoirs les plus pressants de la maternité. Et de même des autres institutions charitables accusées d’émousser le sentiment de la responsabilité et même parfois de dépraver le cœur humain. Les économistes vont plus loin : ils reprochent à un pareil état de choses de créer une disposition générale et toute une doctrine éminemment funeste à la classe ouvrière. Cette classe arrive à croire à une providence extérieure qui s’appelle l’État, chargée de pourvoir à tous ses besoins. Bientôt elle lui demandera l’impossible, à la voix du premier rêveur qui lui fera entendre que l’État peut tout. Que disons-nous ? Ce mal ne se borne pas à la classe ouvrière, il monte de proche en proche, il s’étend de ceux qui reçoivent la charité à ceux qui la font. Dès lors tout tend à l’intrigue, à la supplication, à la bassesse, sinon à la menace et à la violence. Au lieu de compter sur soi, sur son travail énergique et patient, sur une modeste économie, chacun se met à compter sur tout le monde. Triste résultat de lâches ou systématiques concessions faites à une philanthropie homicide, illusion chez les plus généreux et chez les plus honnêtes, chez les autres flatterie déguisée et intéressée faite au peuple !

À ces vives et pressantes raisons, à ces faits invoqués, que trouvent à opposer les défenseurs, j’entends ici seulement les plus modérés et les plus raisonnables, de la charité officielle ?

Il y a, disent-ils, un principe et un fait dans la question de l’assistance légale. En principe, on prétend que l’État