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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

doit se faire le pourvoyeur public et le régulateur des prix.

La question qui s’agitait entre la liberté et la réglementation se posait, là comme ailleurs, sur le double terrain des principes et des faits. Au point de vue des principes, la liberté de la boulangerie donne satisfaction à ce droit naturel reconnu et proclamé par la Révolution française de travailler et de vendre, de choisir et d’exercer telle industrie que l’on voudra sans rencontrer ces limites de nombre qui ne doivent être le fait que des fonctions publiques, ou ces fixations légales de prix, inutiles, si elles représentent le prix réel, injustes et préjudiciables à l’acheteur ou au vendeur (peut-être même, en fin de compte, à l’un et à l’autre) si elles tombent au-dessous ou s’élèvent au-dessus du prix qui résulte de la loi de l’offre et de la demande. Respecter ce principe dans une société qui se pique d’être démocratique et libérale est tout ce qu’il y a de plus essentiel. Les exclusions comme les priviléges, les réglementations abusives ajoutent au tort immédiat qu’elles causent le danger plus grand encore de substituer à l’idée de droit commun celle de l’État disposant de tout en maître, assignant à son gré la place de chacun et faisant le bon marché et la cherté. Est-ce une disposition qui ait tant besoin d’être encouragée en France, où l’on rend si volontiers le gouvernement responsable même de la pluie et du beau temps ?

Que se proposait l’administration par la taxe du pain ? d’empêcher le prix du pain de s’élever à l’excès. Encore une pensée prétendue démocratique ou philanthropique du genre de celles que nous avons rencontrées déjà sur notre chemin, nées de la réglementation moderne. Avant 1789, le pain de ménage était laissé à la libre concurrence. Les corporations n’avaient envahi que le commerce du pain de luxe. Cette pensée de maximum suffit à faire apprécier à sa vraie valeur cette invention du législateur de 1791.