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SUPPRESSION DE L’ÉCHELLE MOBILE

ture française et à l’encouragement que l’on se proposait de donner à la production des céréales, un fait demeurait incontestable, c’est que l’augmentation de cette production n’a fait que suivre depuis 1820 le développement de la population sans le dépasser, et qu’elle continue à rester au-dessous des besoins de la consommation dans des proportions qui sont toujours à peu près les mêmes. Le déficit s’est même aggravé assez notablement dans la période décennale de 1846 à 1855, en tenant compte des deux années de rareté extrême qui se trouvent comprises dans cette période. Comment résister à ces chiffres ? De 1816 à 1855, sous le régime de la prétendue protection, l’excédant des importations sur les exportations a été en moyenne générale, par année, de 199,160 hectolitres. Avait-on su du moins, comme on se le proposait à l’aide de ces combinaisons si savantes et si spécieuses de droits échelonnés par zones, éviter les chertés excessives qui se résolvent en vives souffrances pour le consommateur et surtout pour les classes pauvres, ou échapper à l’avilissement excessif des prix qui est la ruine de l’agriculture  ? Comment le prétendre quand on a vu les prix s’élever sur certains marchés à 35 et 40 fr., et tomber à 21 et à 11 fr. ? Sur 41 années, il y en a eu 25 où les prix moyens annuels ont été inférieurs à 20 fr. ; 6 où ils ont été supérieurs à 24 ; 10 seulement où ils se sont maintenus entre 20 et 24 fr. Bel équilibre en vérité, brillant résultat de cette bascule ingénieuse ! Que l’échelle mobile n’explique pas seule de tels écarts, soit ; mais ce qui est certain, c’est qu’elle a fortement contribué à les produire aussi bien en temps de rareté qu’en temps d’abondance.

Il fallait d’ailleurs entendre dans l’enquête les négociants de Marseille et des autres places pour comprendre comment, grâce à l’échelle mobile, l’importation en temps de rareté était impuissante à faire baisser les prix. Nos départements du Midi ne produisent pas, tant s’en faut, ce qui est né-