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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

notre pays, Rossi, s’accordent à penser qu’il faudrait savoir se résigner à des sacrifices, c’est-à-dire à payer le fer plus cher, s’il était prouvé que la libre entrée du fer étranger constituerait un danger pour le pays en temps de guerre. En effet, le peuple étranger, à la première menace d’hostilité, ne manquerait pas de frapper d’une prohibition de sortie ce métal, nécessaire instrument des batailles en même temps qu’élément vital des industries qui se développent à l’ombre de la paix. Avant de songer à être plus ou moins bien, ne faut-il pas d’abord qu’un peuple songe à être et qu’il s’en garantisse les moyens ?

Nous n’aurons garde d’y contredire mais qu’on remarque pourtant que la pensée de ces économistes s’applique avant tout aux armes fabriquées, armes blanches ou armes à feu. Or, sur ce point, la législation douanière fait beaucoup plus que son devoir. Elle a fort outré des prescriptions qu’à un certain moment pouvait conseiller une prudence patriotique. Notre tarif douanier frappe les armes blanches de commerce, à l’importation, d’un droit de 400 fr. par 100 kil· sous pavillon national, et de 417 fr. sous pavillon étranger et par terre à l’exportation, elles ne sont plus grevées que d’une taxe de 25 c. L’importation et l’exportation des armes blanches de guerre sont prohibées. Quand le gouvernement accorde des exceptions à la défense d’exporter ou d’importer des armes ou parties d’armes de guerre, les armes blanches acquittent les mêmes droits que les armes de chasse et de luxe. Or, quand on sait où en sont aujourd’hui l’importance et la perfection de nos manufactures, peut-on sérieusement prétendre que des droits si exorbitants restent ici nécessaires ? Pour les armes à feu, l’arquebuserie française n’a plus depuis longtemps à redouter la comparaison, au point de vue de la perfection, avec les produits anglais et belges de même nature ; Paris ne le cède en rien, même à Birmingham et à Liège, pour les armes de luxe. Il n’y a guère que pour