Page:Baudrillart - La Liberté du travail, l’association et la démocratie.djvu/132

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
115
LA QUESTION DES LOYERS

des prix exorbitants, surtout à Paris, est venue elle-même tout récemment en fournir la preuve.

Les propriétaires abusent, a-t-on dit. Le peuple paye. Il faut mettre un frein à cette avidité d’une classe privilégiée. Monstrueux raisonnement qui prouve ou beaucoup d’ignorance ou bien peu de logique !

En droit, c’est la société tout entière qu’il faudrait refaire de la base au sommet, au nom de cette façon de raisonner. Nous avons déjà fait voir que la propriété foncière et immobilière n’est pas un privilège plus que les autres. Elle a ses risques, ses charges, ses frais d’acquisition et d’entretien, ses bons et ses mauvais jours qui se compensent, et qui la mettent en équilibre de profits avec les autres emplois du capital. Comment les inventeurs de projets ne voient-ils pas que les oscillations de l’offre et de la demande forment l’histoire de tous les jours ? Comment ne voient-ils pas que l’inégalité de situation qu’elles expriment est écrite partout en caractères éclatants ? Lorsque le blé vient à manquer, est-ce que la demande ne se trouve pas placée dans une infériorité notoire devant l’offre ? Est-ce que le consommateur n’est pas contraint de faire des sacrifices qui s’élèvent parfois à un taux énorme ? Lorsque le blé abonde relativement à la production normale, les prix baissent quelquefois démesurément, et c’est l’agriculture qui supporte la perte. Demande-t-elle une indemnité légale ? Non, l’économie politique démontre que la meilleure compensation est celle qui s’opère naturellement, en répartissant avec autant d’égalité que possible les sacrifices et les avantages sur les vendeurs et les acheteurs d’une année ou d’une période d’années à l’autre[1].

  1. Comment l’économie politique verrait-elle une partie de l’opinion admettre l’efficacité de ces remèdes artificiels, ou du moins en accepter aveuglément l’dée fondamentale, c’est-à--