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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

Pour justifier la taxe de l’argent, on a cité encore la taxe de la boulangerie, c’est-à-dire une fort mauvaise mesure. Mais fût-elle bonne, la comparaison de la taxe du pain avec celle de l’argent pécherait par la base. La taxe du pain embrasse ou embrassait naguère deux ou trois qualités, dont elle fixait le prix en consultant le prix des grains de qualité analogue ; la taxe de l’intérêt ne repose pas sur des combinaisons aussi simples. Essayez de nous indiquer combien il y a de diversités dans les situations et de qualités d’emprunteurs !

Là les degrés sont à l’infini. En Algérie, le taux légal est de 10 pour 100, et le taux conventionnel n’a pas de limites fixes. Ainsi le veut l’état du marché.

Être libre d’user et même d’abuser de sa propriété, de la vendre et de la louer comme on l’entend, et ne pouvoir la prêter à des conditions acceptées, après un libre débat, par celui qui vient trouver le prêteur et le solliciter, c’est ce qu’il est impossible de concevoir.

Aussi la loi est-elle violée à chaque instant par les gouvernements, par les banquiers, par tout le monde. Son action subsiste seulement assez pour gêner, pour empêcher d’utiles transactions.

Elle cause un notable préjudice au petit commerce, à la petite industrie ; aux établissements de crédit populaire, qui trouveraient leur place bien utilement dans notre

    Antilles, en Afrique. On dira peut-être que le négociant français pourrait établir la compensation quant à l’intérêt. Il n’en est pas ainsi ; le fait s’est présenté mais quand, après un assez long délai, le négociant français a voulu, en règlement définitif de compte, réclamer l’intérêt de 12 0/0, on s’y est refusé, et on a même eu recours à une sorte de chantage ; on a dit : La loi française ne le permet pas ; si vous avez retenu cet intérêt, vous avez violé la loi et vous le restituerez ; sinon, je vous dénonce comme coupable d’usure. Devant cette menace, le négociant français a dû céder.