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LA LIBERTÉ DU TRAVAIL ET LA DÉMOCRATIE.

prêt restaient libres, c’est comme si on le contraignait à acheter plus cher la laine, le coton, la houille, les machines, le fer, contre lesquels il se hâte d’échanger sa monnaie. Vous pensiez n’avoir fait une loi de maximum que sur l’argent, vous avez fait une loi qui surélève indirectement les conditions auxquelles on se procure les marchandises et qui rend plus difficile la situation de l’entrepreneur emprunteur, vous avez fait une loi qui pèse sur le commerce et l’industrie.

Nous serions presque tenté de demander pardon de ces réflexions élémentaires aux éminents jurisconsultes qui proclament que l’économie politique est une belle chose, non comme science, mais comme étude. Jugement sévère, qui peut paraître au moins manquer d’à-propos de leur part dans une question faite pour leur inspirer une juste circonspection ; car l’histoire de la question de l’intérêt est celle des tergiversations et des erreurs de la science du droit. Il n’importe ; nous espérons qu’ils voudront bien tenir compte de ce que l’expérience enseigne sur les conditions économiques, selon lesquelles se règle l’intérêt, au lieu de se jeter dans des considérations en elles-mêmes très-peu exactes sur le numéraire. Nous les supplions, par exemple, de vouloir bien s’arrêter un seul instant sur cette démonstration faite par plusieurs économistes et qui saisit par son évidence que la question du taux de l’intérêt ne changerait pas de nature si les payements se faisaient en hectolitres de blé au lieu de se faire en argent.

N’est-il pas étrange que l’on soutienne que la loi ne peut nuire au commerce, parce que rien n’empêche le taux de descendre au-dessous de 5 et de 6 ? Singulière manière d’argumenter ! La question est précisément de savoir si cette loi de maximum n’a point pour effet de surélever le taux de l’intérêt en resserrant le marché des prêts, en excluant de ce marché les prêteurs honnêtes. N’est-ce pas ainsi que se trouvent placés en face d’un usurier ou