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LE CURÉ LABELLE

Québec et d’Ottawa s’intéressaient au plan du curé. Après avoir gagné la ville de Montréal, il agrandit le cercle de ses opérations, aborda l’administration centrale et se risqua dans les ministères et les coulisses du Parlement pour plaider la cause de la colonisation auprès de ceux qui avaient le pouvoir en main.

Il ne tarda pas à s’apercevoir que là, comme partout, des intérêts opposés se trouvaient en présence et se combattaient sans merci. Il y avait grands débats entre les ingénieurs et les députés, les gens du Nord et ceux du Sud. On discutait sur la construction des grandes lignes, et naturellement chacun voulait en faire bénéficier sa province ou son district. M. Labelle donna sur les divers tracés des aperçus tellement justes et tellement vrais, que plus tard on regretta de ne l’avoir pas suivi, et plus d’un ingénieur et d’un député dit dans la suite : « Si nous avions écouté le curé de Saint-Jérôme, nous aurions économisé bien du temps et de l’argent. » Il n’obtint guère dans ses premières campagnes que le surnom de « Père Bon sens » que lui décernèrent d’un commun accord les ingénieurs et les hommes d’affaires.

Il soutenait ses projets avec une dialectique impitoyable et une verve véritablement gauloise.

— Ce que vous dites est vrai, répondaient les hommes d’État, mais nous n’avons pas d’argent.

— Vous en trouverez, ripostait le curé, et