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DES NYMPHES

genoux, en me faisant, en termes pompeux, le serment que l’excès de son amour l’avait porté à cet acte de témérité, mais qu’il n’avait au surplus que des intentions légitimes ; comme mon ingénuité et mon innocence ne voyaient rien de coupable dans sa démarche, et que sa figure d’ailleurs me plaisait infiniment, je lui répondis qu’il était bien honnête et qu’il n’y avait pas de mal à ça ; sur cette assurance, voilà que ses transports ne finissaient pas ; si bien que de transports en transports, il me précipita sur le pied de mon lit, et cueillit dans mon jardin virginal une fleur que je ne savais même pas posséder ; il est vrai qu’il se piqua un peu et moi aussi. Je ris encore de ma naïveté :

— Vous êtes un méchant, disais-je à Édouard ; vous m’avez empêchée de dire mes prières et ma mère me grondera, car j’étais de force à lui tout conter.

Enfin, le jour nous surprit, moi, prenant une dernière leçon d’amour, Édouard éparpillant encore quelques roses sur les lis de mon sein. Il fallut bien se séparer ; moment cruel !… Édouard s’esquiva adroitement pendant que notre vieux portier balayait le devant de la porte ; j’avais de la peine à marcher, j’avais le pied très petit, et l’entorse que je m’étais donnée me cuisait singulièrement. Pâle, défaite, abattue, ma mère, mon oncle me demandèrent si notre promenade m’avait incommodée ; je répondais gau-