Page:Baudoin - Jolis péchés des nymphes du Palais-Royal, 1882.djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
50
JOLIS PÉCHÉS

C’était en effet une insigne trahison pour les personnes que j’y invitais. D’ailleurs, la grande et importante condition, pour pouvoir être admis dans les mystères de ma voluptueuse Thébaïde, c’était d’être deux, jeunes, bien faits, d’une figure au moins agréable, et unis d’une inclination mutuelle : l’amour, le plaisir, la volupté, qui étaient les dieux domestiques de ce temple, n’auraient pas admis de froids profanes qui y fussent venus sans aucun but de galanterie ; et pour me rendre à moi-même mes découvertes plus attrayantes, plus délicieuses, j’avais jugé n’y devoir admettre que de charmantes créatures dans les deux sexes, qui puissent souffrir dans leur nudité les regards curieux d’un indiscret. Au surplus, si j’ai surpris vingt secrets piquants de ces petits mystères d’amour que la femme la plus libertine n’avouerait qu’en rougissant, ma maison, ma table, le luxe, l’abondance, la délicate recherche qui y régnait, étaient bien faits pour faire oublier à mes hôtes les petits désagréments que mon avide et bizarre curiosité leur faisait souffrir. Je vais m’expliquer plus clairement. Un habile architecte avait distribué les appartements, tous à lits jumeaux, à baignoires jumelles, de manière que, levant en dehors le rideau d’une glace sans tain placée au-dessus d’un trumeau, mes yeux plongeaient tout à leur aise, sans être vue, dans le boudoir du couple heureux, et je me faisais le témoin commode