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DES NYMPHES

fils d’argent à la main, riant comme un vrai Cassandre, il m’annonce aussitôt d’un air moitié sérieux, moitié ricaneur, qu’il faut que ma pudeur se prête aux chaînes qu’elle doit porter pendant le temps d’un voyage qu’il a à faire…

Ici on conçoit toute l’attention que prêtaient nos nymphes assemblées au récit ; elles ne comprenaient pas comment on pouvait mettre des entraves à la volupté, elles qui n’en avaient jamais connues ! Enfin Félicia expliqua le procédé florentin dont prétendait se servir son payant :

— D’abord, continua-t-elle, sire Abraham me fit monter sur un sopha. Pendant ce comique manège, Dorival s’était caché adroitement derrière l’étui de ma harpe. Ensuite, m’ayant investi la ceinture d’un charmant réseau composé de mailles de fils d’or et d’argent enrichi de belles pierreries, il y fixa un cadenas sur le côté de la hanche gauche, côté du cœur, et se disposa, en tirant de sa poche une jolie petite clef, à fermer entièrement la porte aux amours… Je riais comme une folle ; l’idée de ce vieillard me paraissait si comique !… Prétendre interdire dans une femme tout accès au plaisir me paraissait d’ailleurs une entreprise si ridicule !

— Vous croyez, lui dis-je, en portant un doute injurieux sur ma fidélité, que de cette manière il me deviendrait impossible de…?

— Oui, de cette façon, ma petite, je serai