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La muse de Théophile Gautier habite un monde plus éthéré. Elle s’inquiète peu, — trop peu, pensent quelques-uns, — de la manière dont M. Coquelet, M. Pipelet, ou M. Tout-le-monde emploie sa journée, et si madame Coquelet préfère les galanteries de l’huissier, son voisin, aux bonbons du droguiste, qui a été dans son temps un des plus enjoués danseurs de Tivoli. Ces mystères ne la tourmentent pas. Elle se complaît sur des hauteurs moins fréquentées que la rue des Lombards : elle aime les paysages terribles, rébarbatifs, ou ceux qui exhalent un charme monotone ; les rives bleues de l’Ionie ou les sables aveuglants du désert. Elle habite volontiers des appartements somptueusement ornés où circule la vapeur d’un parfum choisi. Ses personnages sont les dieux, les anges, le prêtre, le roi, l’amant, le riche, le pauvre, etc. Elle aime ressusciter les villes défuntes et faire redire aux morts rajeunis leurs passions interrompues. Elle emprunte au poëme, non