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convulser ses figures ; il a noirci leurs ombres et illuminé leurs lumières. Son goût prodigieux du détail, qui tient à une ambition immodérée de tout voir, de tout faire voir, de tout deviner, de tout faire deviner, l’obligeait d’ailleurs à marquer avec plus de force les lignes principales, pour sauver la perspective de l’ensemble. Il me fait quelquefois penser à ces aquafortistes qui ne sont jamais contents de la morsure, et qui transforment en ravines les écorchures principales de la planche. De cette étonnante disposition naturelle sont résultées des merveilles. Mais cette disposition se définit généralement les défauts de Balzac ; et, pour mieux parler, c’est justement ses qualités. Mais qui peut se vanter d’être aussi heureusement doué, et de pouvoir appliquer une méthode qui lui permette de revêtir, à coup sûr, de lumière et de pourpre la pure trivialité ? Qui peut faire cela ? Or, qui ne fait pas cela, pour dire la vérité, ne fait pas grand’chose.