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lement à la même intensité de jour, Callias les avait placés de manière que chacun ne pouvait recevoir de lumière que ce qu’il lui en fallait pour faire briller tous ses avantages dans leur expression la plus complète. — Une danse de jeunes Lacédémoniennes sur les bords de l’Eurotas — le soir — était située dans l’endroit où le soleil couchant jetait toute sa splendeur ; les crêtes des montagnes brûlaient d’un feu court, mais naturel, et pour ainsi dire vivant ; les forêts étagées sur leurs flancs balançaient des ombrages d’un or naturel ; les casques mêmes et les légers boucliers que portaient les jeunes filles dans leurs aimables simulacres de guerres, étaient allumés comme de l’acier véritable par la toute-puissance des rayons.

Dans un coin très-retiré, et ne pouvant être touchée que d’un très-pauvre rayon lumineux, était une Incantation Thessalienne, solennelle, sévère, terrible ! La profondeur des bois, à travers lesquels se mouvaient de majestueuses formes de spectres, prenait un aspect encore plus sombre par le faible rayon qui ne servait, comme un léger pinceau, qu’à enrichir la sombre peinture de quelques touches plus claires.

Au-dessus était encadré dans une bordure d’albâtre richement travaillé un chef-d’œuvre d’Alcamènes d’Ionie. C’était l’Olympe et la scène décrite par Homère, où Vénus dans l’assemblée des Immortels vient implorer Jupiter et le rendre propice aux Troyens. Avec cette prodigalité des millionnaires qui sacrifient des monceaux de richesses et des trésors de génie pour la