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médecins illustres de ce temps, lithographiés par Maurin, qu’on a pu voir étalée pendant plusieurs années sur le quai Voltaire.

« Tiens ! le reconnais-tu celui-ci ?

— Oui ! c’est X. Le nom est au bas d’ailleurs ; mais je le connais personnellement.

— Je savais bien ! Tiens ! voilà Z. celui qui disait à son cours, en parlant de X. : « Ce monstre qui porte sur son visage la noirceur de son âme ! » Tout cela, parce que l’autre n’était pas de son avis dans la même affaire ! Comme on riait de ça à l’École, dans le temps ! Tu t’en souviens ? — Tiens, voilà K., celui qui dénonçait au gouvernement les insurgés qu’il soignait à son hôpital. C’était le temps des émeutes. Comment est-ce possible qu’un si bel homme ait si peu de cœur ? — Voici maintenant W., un fameux médecin anglais ; je l’ai attrapé à son voyage à Paris. Il a l’air d’une demoiselle, n’est-ce pas ? »

Et comme je touchais à un paquet ficelé, posé aussi sur le guéridon : « Attends un peu, dit-elle ; — ça, c’est les internes, et ce paquet-ci, c’est les externes. »

Et elle déploya en éventail une masse d’images photographiques, représentant des physionomies beaucoup plus jeunes.

« Quand nous nous reverrons, tu me donneras ton portrait, n’est-ce pas, chéri ?

— Mais, lui dis-je, suivant à mon tour, moi aussi, mon idée fixe, — pourquoi me crois-tu médecin ?