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M. Hostein a été l’ami de Balzac. N’est-ce pas vous, Monsieur, qui avez si bien fait la mise en scène de La Marâtre ? — M. Hoslein doit parfaitement bien comprendre la valeur d’un ouvrage qui a l’air d’un de ces rares précurseurs du théâtre que rêvait Balzac.

Dans les théâtres subventionnés, rien ne se fait, rien ne se conclut, rien ne marche ; tout le monde y est timide et bégueule.

Puis, il serait curieux de vérifier si, définitivement, ce public du boulevard, si méprisé, ne serait pas apte à comprendre et à applaudir un ouvrage d’une merveilleuse portée, — je ne veux pas prononcer le mot littéraire qui appartient à l’affreux argot de notre époque.

J’ai pensé que les succès infatigables de votre théâtre vous autorisaient à faire une éclatante tentative sans imprudence, et que Les Cosaques et Le Sanglier pouvaient bien, — à mettre les choses au pire, — payer la bienvenue de Diderot.

Si je voulais surexciter votre orgueil, je pourrais vous dire qu’il est digne de vous de perdre de l’argent avec ce grand auteur ; mais, malheureusement, je suis obligé de vous avouer que je suis convaincu qu’il est possible d’en gagner.

Enfin, — irai-je jusqu’au bout ? — car, ici, moi, inconnu de vous, j’ai l’air d’empiéter indiscrètement sur vos droits et vos fonctions, — il m’a semblé qu’un acteur merveilleux par sa véhémence, par sa finesse, par son caractère poétique, un acteur qui m’a ébloui dans Les Mousquetaires, — j’ignore totale-