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tamiiiets, — des matelots, des ag-ents de police.

Voici la scène du crime. — Remarquez bien qu’il est déjà prémédité. L’homme arrive le premier au rendez-vous. Le lieu a été choisi par lui. — Diman- che soir. — Route ou plaine obscure. — Dans le lointain, bruits d’orchestres de bastringue. — Paysage sinistre et mélancolique des environs de Paris. — Scène d’amour, — aussi triste que possi- ble, — entre cet homme et cette femme ; — il veut se faire pardonner ; — il veut qu’elle lui permette de vivre et de retourner près d’elle. Jamais, il ne l’a trouvée si belle… Il s’attendrit de bonne foi. — 11 en redevient presque amoureux, il désire, il sup- plie. La pâleur, la maigreur la rendent plus inté- ressante, et sont presque des excitants. Il faut que le public devine de quoi il est question. Malgré que la pauvre femme sente aussi sa vieille affection remuée, elle se refuse à cette passion sauvage dans

pareil lieu. Ce refus irrite le mari qui attribue cotte chasteté à l’existence d’une passion adultère ou à la défense d’un amant. Il faut en finir ; cepen- dant, je n’en aurai jamais le courage, je ne peux pas faire cela moi-même. Une idée de g^nie, — pleine de lâcheté et de superstition, — lui vient.

Il feint de se trouver très mal, ce qui n’est pas difficile, son émotion vraie aidant à la chose : Tiens, là-bas, au bout de ce petit chemin, à gauche, tu trouveras un pommier ; — va me chercher un fruit. (Remarquez qu’il peut trouver un autre pré- texte, — je jette celui-là sur le papier en courant.) T^a nuit « ’sl h-A^ iw.ire, la lune s’est cachée. Sa