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elle-même, d’une affaire aussi petite ; mais, quand il a appris que Duranly cherchait à faire élargir son privilège et à fonder, au lieu d’un théâtre enfantin, un vrai théâtre machiné, avec trucs, pour pantomimes jouées par de véritables comédiens (reconnaissez-vous l’influence de Champfleury ?), il a retiré sa parole. Je ne sais pas pourquoi Duranty n’a jamais voulu aller le voir. Je ne vous raconte cette histoire, que comme échantillon de la facilité de Gélis à entrer dans les affaires.

J’ai deux questions à vous faire. — 1.— Si la chose réussit (et je crois sentir qu’elle va réussir), et si votre beau-frère, intimidé par cet élargissement de commerce, refuse son assentiment, pouvez-vous compter sur l’influence morale de votre mère ? — 2.— Si vous réussissez, que voulez-vous faire ? Avant tout, prenez bien garde de tomber dans le rêve d’une fabrication démesurée, à bas prix ; votre originalité doit se placer ailleurs, et vous savez que la tendance générale est à hausser les prix. Le livre à 20 sols est le fléau des maisons Lévy et Bourdilliat. Si l’un de ces messieurs consentait à cesser le premier, l’autre serait délivré. Ils se font un mal réciproque, voilà tout.

Je crois que c’est là une question très importante : se faire une spécialité. Par le livre à 5 fr., le livre à 3 fr. et le livre à 2 fr., vous pourrez former une collection importante d’ouvrages bons ou passables, et bien fabriqués.

Je dois vous dire que toutes ces réflexions me viennent, en me souvenant de quelques mots que