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montagne ?… Quant aux longs poèmes, nous savons ce qu’il en faut penser : c’est la ressource de ceux qui sont incapables d’en faire de courts. Tout ce qui dépasse la longueur de l’attention que l’être humain peut prêter à la forme poétique n’est pas un poème.

A JOSÉPHIN SOULARY

Le 23 Février 1860.

Monsieur et ami,

(Vous permettrez ce titre que je sollicitais de votre part) je n’aurais certes pas attendu une lettre de vous pour vous remercier de votre volume, si j’avais su où vous adresser mes remerciements. l’ai relu, pour la troisième fois, car je n’ai pas besoin de vous dire que vous êtes pour moi une vieille connaissance, et que, dès que votre ouvrage parut, j’en sus goûter la saveur toute particulière, toute la vinosité.

J’ai trouvé, avec la plus grande jouissance, dans cette nouvelle édition, des morceaux qui m’étaient inconnus, entre autres le sonnet adressé à un correcteur d’épreuves, que je juge une merveille. Mais, à ce sujet, permettez-moi (puisque vous voulez être l’ami d’un pédant, le malheur viendra de vous) de vous présenter quelques observations.

Vous donnez le pressentiment et le goût de la perfection ; vous êtes un de ces hommes très privilégiés, faits pour sentir l’art dans son extrême