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CHARLES BAUDELAIRE

de diffamer les alliés de la France, d’où qu’ils lui vinssent.

La politique, mon cher ami, est une science sans cœur. C’est ce que tu ne veux pas reconnaître. Si tu étais jésuite et révolutionnaire, comme tout vrai politique doit Têtre, ou l’est fatalement, tu n’aurais pas tant de regrets pour les amis jetés de côté. Je sais que je te fais horreur ; mais, dis-moi, as-tu seu- lement remarqué avec quel à propos sont venues les Lettres diplomatiques de Joseph de Maistre, publiées par M. de Cavour, lettres où, pour le dire en passant, le Pape est traité de polichinelle ? Quel réquisitoire contre l’Autriche ! Le Piémont avait gardé ces lettres en réserve, et les a publiées au bon moment.

Je crois seulement qu’en mettant les choses au mieux ^’Empereur, couvert de gloire et béni de tout le monde, l’embarras sera dans l’usage de la vic- toire.

Pour tous tes chagrins personnels, mon ami, résignation, résignation.

Quand j’irai chez toi, je te parlerai des miens qui s’accumulent, et je te ferai pitié. Je crois sin- cèrement qu’excepté pour un petit nombre de jeunes gens intelligents (riches, et sans famille î), qui ne savent pas user de leur bonheur, la vie doit être une perpétuelle douleur.

Tout à toi.

Maintenant, si tu veux rire, lis, comme moi, Lima vrac et Granier de Cassagnac. Il paraît que