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VII
AVERTISSEMENT.

dans les Épaves ne prît place dans l’édition définitive des Fleurs du Mal. Et cette assertion , émanant d’un ami intime du poète, ne fait d’ailleurs que confirmer, remarquons-le, l'Avertissement de l’Éditeur qui figure en tête du recueil de 1866.

En 1868 Asselineau et Banville ont passé outre aux protestations pourtant vives et réitérées de Poulet-Malassis. Ils avaient leurs raisons, dont il est aisé de présumer la principale : un jugement du Tribunal correctionnel (Lille, 6 mai 1868) venant de frapper les Épaves, on ne pouvait songer à les réimprimer, en France du moins ; l’eût-on pu d’ailleurs, la prudence eût conseillé de s’en garder, tant à cause des morceaux très libres qui s’y trouvent, que du ton hautain et provocant de l’avertissement liminaire. D’autre part l’essentiel, à leurs yeux, et ceci vaut qu’on les absolve de leur audace, — comme fit Poulet-Malassis en fin de compte, — était de remettre en pleine lumière une œuvre et un nom quelque peu oubliés depuis que le poète s’était fixé en Belgique. Or, quel moyen plus efficace, pour solliciter la curiosité du public, que de grossir abondamment l’édition nouvelle ? Donc ils empruntèrent aux Épaves toutes les pièces qui n’étaient point susceptibles d’attirer une fois de plus les foudres de la justice.

Mais aujourd’hui les circonstances ont changé. Baudelaire est au zénith de sa gloire. Il faut revenir au strict respect de ses intentions.

C’est ce que nous avons fait ici, d’autant plus volontiers que l’introduction, dans les Fleurs du Mal, des pièces en cause nous avait toujours paru gâter ce qu’on a appelé, avec un peu d’emphase peut-être, l’architecture secrète du