Page:Baudelaire - Les Fleurs du mal, Conard, 1922.djvu/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
SPLEEN ET IDÉAL.


LXXXXI

LA PRIÈRE D’UN PAÏEN.


Ah ! ne ralentis pas tes flammes ;
Réchauffe mon cœur engourdi,
Volupté, torture des âmes !
Diva ! supplicem exaudî !

Déesse dans l’air répandue,
Flamme dans notre souterrain !
Exauce une âme morfondue,
Qui te consacre un chant d’airain.

Volupté, sois toujours ma reine !
Prends le masque d’une sirène
Faite de chair et de velours,

Ou verse-moi tes sommeils lourds
Dans le vin informe et mystique,
Volupté, fantôme élastique !