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auquel assista toute la presse, et l’enthousiasme qu’il excita est constaté par un feuilleton de Jules Janin, de la fin de septembre 1846. Il appartenait dès lors à la troupe du Théâtre-Historique ; tout le monde se rappelle avec quel éclat il joua le Charles IX dans la Reine Margot. On crut voir le vrai Charles IX ; c’était une parfaite résurrection. Malgré la manière décisive dont il joua le terrible rôle de Hamlet au même théâtre, il ne fut pas rengagé, et ce fut seulement dix-huit mois plus tard qu’il créa avec beaucoup d’originalité le Fritz du Comte Hermann. Ces succès répétés, mais à des intervalles souvent lointains, ne faisaient cependant pas à l’artiste une position solide et durable ; on eût dit que ses qualités lui nuisaient et que sa manière originale faisait de lui un homme embarrassant. À la Porte-Saint-Martin, où une malheureuse faillite l’empêcha d’accomplir un engagement de trois ans, il créa Masaniello dans Salvator Rosa. Dans ces derniers temps, Rouvière a reparu avec un éclat incomparable à la Gaîté, où il a joué le rôle de Mordaunt, et à l’Odéon, où Hamlet a été repris et où il a soulevé un enthousiasme sans pareil. Jamais peut-être il ne l’avait si bien joué ; enfin, sur le même théâtre, il vient de créer Favilla, où il a développé des qualités d’un ordre inaccoutumé, auxquelles on était loin de s’attendre, mais qu’avaient pu deviner ceux qui avaient fait de lui une étude particulière.

Maintenant que la position de Rouvière est faite, position excellente, basée à la fois sur des succès po-