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amoureuse. L’optimisme de Dupont, sa confiance illimitée dans la bonté native de l’homme, son amour fanatique de la nature, font la plus grande partie de son talent. Il existe une comédie espagnole où une jeune fille demande en écoutant le tapage ardent des oiseaux dans les arbres : Quelle est cette voix, et que chante-t-elle ? Et les oiseaux répètent en chœur : l’amour, l’amour ! Feuilles des arbres, vent du ciel, que dites-vous, que commandez-vous ? Et le chœur de répondre : l’amour, l’amour ! le chœur des ruisseaux dit la même chose. La série est longue, et le refrain est toujours le même. Cette voix mystérieuse chante d’une manière permanente le remède universel dans l’œuvre de Dupont. La beauté mélancolique de la nature a laissé dans son âme une telle empreinte, que s’il veut composer un chant funèbre sur l’abominable guerre civile, les premières images et les premiers vers qui lui viennent à l’esprit sont :

La France est pâle comme un lys,
Le front ceint de grises verveines.

Sans doute, plusieurs personnes regretteront de ne pas trouver dans ces chants politiques et guerriers tout le bruit et tout l’éclat de la guerre, tous les transports de l’enthousiasme et de la haine, les cris enragés du clairon, le sifflement du fifre pareil à la folle espérance de la jeunesse qui court à la conquête du monde, le grondement infatigable du canon, les gémissements des blessés, et tout le fracas de la victoire, si cher à