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voir l’intelligence du peuple relativement aux beaux-arts.

Plus l’art voudra être philosophiquement clair, plus il se dégradera et remontera vers l’hiéroglyphe enfantin ; plus au contraire l’art se détachera de l’enseignement et plus il montera vers la beauté pure et désintéressée.

L’Allemagne, comme on le sait et comme il serait facile de le deviner si on ne le savait pas, est le pays qui a le plus donné dans l’erreur de l’art philosophique.

Nous laisserons de côté des sujets bien connus, et par exemple, Overbeck n’étudiant la beauté dans le passé que pour mieux enseigner la religion ; Cornélius et Kaulbach, pour enseigner l’histoire et la philosophie (encore remarquerons-nous que Kaulbach ayant à traiter un sujet purement pittoresque, la Maison des fous, n’a pas pu s’empêcher de le traiter par catégories et, pour ainsi dire, d’une manière aristotélique, tant est indestructible l’antinomie de l’esprit poétique pur et de l’esprit didactique).

Nous nous occuperons aujourd’hui, comme premier échantillon de l’art philosophique, d’un artiste allemand beaucoup moins connu, mais qui, selon nous, était infiniment mieux doué au point de vue de l’art pur, je veux parler de M. Alfred Béthel, mort fou, il y a peu de temps, après avoir illustré une chapelle sur les bords du Rhin, et qui n’est connu à Paris que par huit estampes gravées sur bois dont les deux dernières ont paru à l’Exposition universelle.