l’attribuer à Joseph de Maistre, ce soldat animé de l’Esprit-Saint ? J’ai un vague souvenir de l’avoir lue dans un de ses livres, mais donnée comme citation, sans doute. Cette sévérité de pensée et de style va bien à la sainteté majestueuse de Bossuet ; mais la tournure elliptique de la pensée et la finesse quintessenciée me porteraient plutôt à en attribuer l’honneur à Bourdaloue, l’impitoyable psychologue chrétien. Cette singulière maxime me revient sans cesse à l’esprit depuis que j’ai conçu le projet de cet article, et j’ai voulu m’en débarrasser tout d’abord.
Analysons, en effet, cette curieuse proposition :
Le Sage, c’est-à-dire celui qui est animé de l’esprit du Seigneur, celui qui possède la pratique du formulaire divin, ne rit, ne s’abandonne au rire qu’en tremblant. Le Sage tremble d’avoir ri ; le Sage craint le rire, comme il craint les spectacles mondains, la concupiscence. Il s’arrête au bord du rire comme au bord de la tentation. Il y a donc, suivant le Sage, une certaine contradiction secrète entre son caractère de sage et le caractère primordial du rire. En effet, pour n’effleurer qu’en passant des souvenirs plus que solennels, je ferai remarquer, — ce qui corrobore parfaitement le caractère officiellement chrétien de cette maxime, — que le Sage par excellence, le Verbe Incarné, n’a jamais ri. Aux yeux de Celui qui sait tout et qui peut tout, le comique n’est pas. Et pourtant le Verbe Incarné a connu la colère, il a même connu les pleurs.
Ainsi, notons bien ceci : en premier lieu, voici un