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humain pour la femme. Voilà donc le moyen d’étonnement trouvé ! « Il l’entraîne ; saura-t-elle résister ? » telle est la question que se fera tout le public féminin. Un sentiment bizarre, compliqué, fait en partie de terreur et en partie de curiosité priapique, enlèvera le succès. Cependant, comme M. Frémiet est un excellent ouvrier, l’animal et la femme seront également bien imités et modelés. En vérité, de tels sujets ne sont pas dignes d’un talent aussi mûr, et le jury s’est bien conduit en repoussant ce vilain drame.

Si M. Frémiet me dit que je n’ai pas le droit de scruter les intentions et de parler de ce que je n’ai pas vu, je me rabattrai humblement sur son Cheval de saltimbanque. Pris en lui-même, le petit cheval est charmant ; son épaisse crinière, son mufle carré, son air spirituel, sa croupe avalée, ses petites jambes solides et grêles à la fois, tout le désigne comme un de ces humbles animaux qui ont de la race. Ce hibou, perché sur son dos, m’inquiète (car je suppose que je n’ai pas lu le livret), et je me demande pourquoi l’oiseau de Minerve est posé sur la création de Neptune ? Mais j’aperçois les marionnettes accrochées à la selle. L’idée de sagesse représentée par le hibou m’entraîne à croire que les marionnettes figurent les frivolités du monde. Reste à expliquer l’utilité du cheval qui, dans le langage apocalyptique, peut fort bien symboliser l’intelligence, la volonté, la vie. Enfin, j’ai positivement et patiemment découvert que l’ouvrage de M. Frémiet représente l’intelligence humaine portant